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Les constructions biosourcées se prémunissent contre les feux de forêts

Publié le 14/02/2025 dans Actualité réseau

Le projet de recherche Bois Zif vise à élaborer un cadre technique pour l’usage du bois et des matériaux biosourcés dans les zones soumises au risque d’incendie de forêt.

« À l’été 2018, le chantier d’une école en bois que nous construisions dans les quartiers nord de Marseille a brulé à cause  d’un incendie de forêt, qui s’est pourtant déclaré à plus de 800 m de là, de l’autre côté du faisceau d’autoroutes », expose Olivier Gaujard, vice-président de Fibois Sud et fondateur du bureau d’études structure bois Gaujard Technologies Scop, lors du deuxième Congrès Paille qui s'est tenu à Paris fin janvier. Comme pour 90 % de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, cette construction se situait dans une zone à risque d’incendie de forêt. « C’est-à-dire sur des sites où les incendies sont susceptibles de se propager. Extrêmement chauds, les flux thermiques précèdent l’arrivée des flammes, tandis que des brandons incandescents, ces corps enflammés transportés par le vent, peuvent s’accumuler sur les surfaces horizontales ou sur les gouttières, les appuis de fenêtres, les seuils de portes », détaille Olivier Gaujard. 

Pire, avec le changement climatique, ce phénomène s’étend à d’autres régions, telles que  les Landes, les Vosges ou même la Bretagne. En 2022, 72 000 ha ont brulé en France. Le sujet devient une préoccupation nationale.

Manque de documentation technique

Pourtant, la RE 2020 incite fortement à recourir aux matériaux biosourcés, par nature combustibles, afin de limiter l’empreinte environnementale des bâtiments. Dans ce contexte, les services instructeurs de permis de construire, tout comme les services de secours (Sdis) ne disposent ni d'un cadre, ni d'outils pour instruire les projets situés en zone à risque.  A leur disposition, une note technique du 29 juillet 2015 donne quelques indications succinctes, ainsi qu’un  guide de recommandation publié en 2016 par Envirobat BDM, sans valeur règlementaire.

Or, la doctrine des pompiers est claire : « les constructions exposées doivent être conçues de manière à constituer un refuge protecteur pour leurs occupants pendant au moins une demi-heure et ainsi éviter les mouvements de foule », indique Olivier Gaujard. 

Les constructions biosourcées se prémunissent contre les feux de forêts

© Adobe Stock / David A Litman


 


Bois Zif, 3 ans d’études

Face à cette injonction contradictoire, le programme Bois Zif, pour zones à risque d'incendie de forêt, porté par un consortium de partenaires coordonné par Fibois Sud (1) a été lancé en octobre dernier. D’une durée de 36 mois pour un budget de 600 000 euros, il vise à élaborer un cadre technique pour les constructions biosourcées établies dans les zones urbaines, périurbaines et villageoises concernées par le risque d’incendie de forêt. « Il n’a pas vocation à promouvoir la construction dans les espaces forestiers fermés », prévient toutefois le vice-président de Fibois Sud.

Déterminer la constructibilité d’un site vis-à-vis du risque

Le projet Bois Zif prend en compte tous les aspects de la construction, depuis l’analyse du site choisi jusqu’à la conception des détails constructifs afin d’apporter une solution globale. Il vise d’abord à mettre en place un outil afin de déterminer la constructibilité d’un site. Destiné aux maîtres d’œuvre et maîtres d’ouvrage, il sera valable en l’absence de Plan de prévention des risques d'incendies de forêt (PPRIF) ou de « Porter à connaissance ». Le document servira à évaluer le niveau d’aléa (élevé, moyen ou nul) en tenant compte de la densité de végétation, des possibilités de protéger et de défendre le site, des vents et de la distance par rapport au massif forestier.

Qualifier les complexes de parois

Zif Bois s’attachera également à qualifier trois complexes de murs et trois autres de toitures. « Les exigences des essais menés porteront, pour une paroi composite (ossature bois, isolant biosourcé et enduit par exemple), sur la mise en place d’un écran thermique (réaction au feu A2 - s1, d0) devant les éléments porteurs. Cet écran devra résister au feu pendant 30 minutes et le matériau combustible derrière l’écran thermique ne devra pas entrer en pyrolyse », détaille Claire Harmand, prescriptrice bois et cheffe du projet de recherche pour Fibois Sud.

Gérer les interfaces

Une fois les comportements de parois validés, les équipes mettront en œuvre un guide pour la gestion sécurisée des points singuliers et des interfaces entre éléments de construction. La méthode AJT (acronyme d’angles, joints, trous) servira à repérer systématiquement les situations à risques face aux flux thermiques et aux brandons.

Vers une approche performancielle

Enfin, pour les constructions plus complexes, les experts s’attèleront à définir une méthodologie pour une approche performancielle. Ils s’appuieront sur l’Ingénierie de la sécurité incendie (Isi). « Pour y parvenir, nous testerons deux compositions de murs et de toitures face à trois intensités de feu qui correspondent à autant d’expositions possibles  », prévoit Olivier Gaujard

L’ensemble des résultats seront largement diffusés afin de favoriser le développement de projets en bois et biosourcés dans les zones périurbaines concernées par le risque incendie de forêt.

 

(1) Les partenaires bénéficiaires de ce projet sont le laboratoire Efectis, l'Entente pour la forêt méditerranéenne - Ceren Valabre (Centre d'essais et de recherche), et l'entreprise de construction modulaire 2D Lign.O.

@Le Moniteur, Amélie Luquain